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samedi 21 avril 2018

Dans les écoles, des Atsem en mal de reconnaissance


21 avril 2018

Dans les écoles, des Atsem en mal de reconnaissance

Depuis le 19 avril, les agents spécialisés de l'école maternelle sont appelés à faire grève

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C'est un matin comme un autre dans la classe de Sandra Lestruhaut, à l'école maternelle de Reuilly, dans le 12e arrondissement de Paris. La classe des moyens-grands est divisée en petits groupes. Pendant que l'institutrice s'occupe d'un exercice de graphie, Patricia Serret aide Samuele, Leah et Gabin à comprendre comment fonctionne le " jeu du corps humain ". Les enfants appellent Sandra Lestruhaut " maîtresse ",et Patricia Serret " Patou ". Le nom de son poste est un acronyme qui ne leur dirait de toute façon pas grand-chose : Atsem, pour " agent territorial spécialisé de l'école maternelle " (on parle même plutôt d'ASEM à Paris).
Ils sont 50 000 en France à exercer ce métier méconnu, auquel on accède après un CAP " accompagnant éducatif petite enfance " ou qualification équivalente. Le 19  avril, les Atsem, qui aspirent à une plus grande reconnaissance, étaient appelés à faire grève pour demander la revalorisation de leurs salaires et de leur statut. Sans donner d'estimation exacte sur le suivi de cette grève, l'intersyndicale a appelé à une mobilisation reconductible sous différentes formes : grève de quelques heures, interpellation des parents…
Le statut vient d'évoluerLongtemps cantonnés dans l'imaginaire collectif au rôle de " dames de service ", les Atsem ne s'occupent plus seulement de l'hygiène des enfants et du ménage, et sont les fils rouges de la journée de l'enfant : " Ils sont les seuls adultes qu'ils voient du matin jusqu'au soir, en comptant la cantine et la sieste ", explique Isabelle Daneyrole, directrice de la maternelle de Reuilly.
Ces agents municipaux – presque exclusivement des femmes – sont placés sous la double autorité de l'école et de la commune. Ils peuvent aider aux ateliers organisés par l'enseignant, mais selon le collectif Atsem de France, qui rassemble 11 000 membres, c'est loin d'être le cas partout. La relation entre l'enseignant et l'Atsem, fondamentale, dépend de la bonne volonté des uns et des autres. " Des enseignants se permettent des remarques déplacées, note Gaëlle Le Notre, l'une des fondatrices du collectif. Ils se disent entre eux : “Si tu veux, je te prête mon Atsem.” "
La réforme des rythmes scolaires, en  2013, a contribué à transformer le rôle des Atsem. Désormais, les enfants terminent l'école plus tôt – l'emploi du temps définitif dépend des communes – et basculent sur un temps d'activité péri-scolaire (TAP). Dans de nombreuses écoles, par manque d'animateurs formés, ce sont les Atsem qui endossent ce rôle. Avec des journées plutôt chargées.
Le mardi et le vendredi, les ASEM de l'école de Reuilly s'occupent des ateliers le matin avant une pause-déjeuner, puis la cantine des enfants et la sieste. A 15  heures, elles se transforment en animatrices. Il faut, en quelques minutes, ranger la classe et mettre en place les activités périscolaires. Parfois, le ménage doit être fait après le départ des enfants, à 16 h 30. " Les jours où on anime le TAP, c'est un peu dur ", concède Cathy Roy-Camille, jeune ASEM de Reuilly qui gagne, en -début de carrière, environ 1 300  euros net par mois.
Le statut des Atsem vient juste d'évoluer, pour prendre acte de ces nouvelles missions. Le décret relatif à leur statut stipule que les Atsem " appartiennent à la communauté éducative ". Une victoire pour le collectif, invité aux assises de la maternelle, le 28  mars à Paris, mais qui revendique d'autres évolutions : une plus grande flexibilité dans la grille de revenus et un taux d'encadrement plus important. " Il y a des écoles où il y a un Atsem pour deux classes, dit Mme Le Notre. Il passe son temps à passer d'une classe à l'autre, dix minutes par ci, quinze par là… " Unifier les pratiques consistant à affecter un Atsem par classe, au moins pour les petits niveaux, améliorerait clairement les conditions de travail.
Pour ce collectif comme pour les auteurs d'un rapport conjoint des inspections générales de l'éducation et de l'administration (IGEN et IGA), publié en juillet 2017, la formation est le nerf de la guerre. Dans ce texte, l'IGA et l'IGEN insistaient sur l'importance d'une formation " renforcée ". Celle-ci inclut peu d'éléments sur le développement de l'enfant. Les Atsem ont longtemps pâti d'une réputation commune à bien des métiers de la petite enfance, qui veut qu'" être mère " ou " aimer les enfants "suffise à savoir s'occuper d'eux.
Violaine Morin
© Le Monde

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