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samedi 21 avril 2018


21 avril 2018

Evacuation à Tolbiac : " Tout s'est passé très vite "

Une vaste opération policière a été lancée vendredi à l'aube, après quatre semaines d'occupation

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A NANTERRE, BLOCAGE VOTÉ JUSQU'AU 2 MAI
Réunis en assemblée générale jeudi 19 avril, plus d'un millier d'étudiants de Paris-X Nanterre ont reconduit jusqu'au 2 mai le blocage de l'université ; 342 étudiants ont voté contre et 24 se sont abstenus, selon le décompte des organisateurs. Après une semaine de vacances, une nouvelle AG aura lieu le 2 mai, au premier jour d'une nouvelle période de partiels. Des enseignants ont annoncé que l'assemblée générale du personnel avait, elle aussi, voté la poursuite de la grève." Où est le progrès lorsque nos études sont bloquées, lorsque des projets sont mis en péril ? ",a déclaré un étudiant en droit opposé au blocage. Estimant que la dernière assemblée générale avait réuni 5,4 % des étudiants, un autre a demandé " un vrai vote électronique ".
C'est ma première évacuation policière, je suis encore sous le choc. " Comme Ayse, étudiante en philosophie à l'université Panthéon-Sorbonne, quelques dizaines d'anciens occupants du site universitaire parisien de Tolbiac (13e arrondissement), restent sur le trottoir vendredi 20 avril au matin. Aux alentours de 5  heures du matin, une vaste opération policière lancée alors que la centaine d'étudiants sur place dormaient encore, a permis d'évacuer en à peine quarante-cinq minutes ce lieu emblématique de la mobilisation contre la réforme de l'accès à la fac.
" On ne les a pas vus arriver, tout s'est passé très vite ",commente Ayse, qui évoque des " violences " au moment où les CRS ont essayé de la faire sortir de l'amphi où elle avait fait une chaîne humaine avec ses camarades. Derrière les grilles du bâtiment, des pneus, des chaises, des poubelles et des canettes de bière éparpillés jonchent le sol. Sur les murs, les slogans tels que " Nos rêves sont les racines de notre lutte " sont tout ce qu'il reste de cette occupation commencée le 26  mars.
Un " retour à la sérénité "L'opération, qui a pris fin vers 6  heures vendredi, s'est déroulée " dans le calme " et sans " incident ", selon la Préfecture de police qui a, par ailleurs, relevé " des dégradations nombreuses " sur le site. Seul un individu a été interpellé pour outrage et rébellion. Interrogé par Le Monde, Georges Haddad, le président de l'université Panthéon-Sorbonne, se dit " soulagé et plus que satisfait " de cette opération. Il remercie les forces de l'ordre qui ont, selon lui, agit " avec un savoir-faire exemplaire ", et souhaite maintenant un " retour à la sérénité ".
La mobilisation étudiante contre la loi " orientation et réussite des étudiants ", accusée par ses contempteurs de mettre en place une sélection à l'entrée de l'université, perturbe encore le fonctionnement d'une quinzaine d'universités. Cela faisait presque quatre semaines que le site de Tolbiac, régulièrement à la pointe des mobilisations étudiantes, était occupé par des étudiants opposés. Et plus d'une semaine et demie que son président Georges Haddad avait officiellement demandé à la Préfecture de police de faire intervenir les forces de l'ordre, notamment après la découverte de cocktails Molotov dans l'établissement. Mais la Préfecture avait jusqu'ici repoussé une opération aussi sensible.
Dimanche, à l'occasion de son interview par Edwy Plenel et Jean-Jacques Bourdin, le président de la République avait apporté des éléments d'explication, soulignant " une particularité topographique à Tolbiac " : " C'est une tour et l'appréciation de ceux qui ont à faire respecter l'ordre, c'est que c'est presque plus dangereux - d'intervenir - que de ne pas intervenir. " Le site regroupe en fait trois tours de 9, 16 et 22 étages. Son rez-de-chaussée et ses amphis étaient le lieu de vie de 50 à 200 étudiants, présents jour et nuit. Le site accueille habituellement quelque 10 000 étudiants, en majorité inscrits en sciences humaines.
Vendredi, sur son compte Twitter, le ministre de l'intérieur, Gérard Collomb, s'est félicité de cette opération, lui qui avait assuré devant l'Assemblée nationale mercredi :" Partout nous rétablirons l'Etat de droit et en particulier dans les facultés, où une minorité empêche les étudiants de passer leurs examens. " Sur BFM-TV, la ministre de l'enseignement supérieur, Frédérique Vidal a, elle, jugé " très important que les choses puissent revenir à la normale " ajoutant que les prochains examens partiels ne s'y tiendraient " probablement " pas et devront être délocalisés.
Vendredi matin, devant le site de Tolbiac vide et bloqué par un cordon de CRS, Emma, une étudiante en licence de langue évacuée dans la nuit promet " qu'à la première opportunité nous réoccuperons Tolbiac, car notre occupation était légitime. Nous continuerons à lutter contre la politique de Macron et la loi Vidal ". Non loin d'elle, une autre étudiante rappelle qu'" en Mai 68, c'est lorsqu'ils ont fait intervenir les flics dans les facs qu'a démarré le mouvement ". Jeudi, la manifestation parisienne contre la politique gouvernementale, à laquelle participaient les étudiants mobilisés, a réuni seulement 15 300 personnes.
Séverin Graveleau et Eric Nunès
© Le Monde

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