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mercredi 20 septembre 2017

Une baliverne hype .....

20 septembre 2017
Laurent Joffrin
La lettre politique
de Laurent Joffrin

Une baliverne hype

La nouvelle épuration qui se profile au FN n’aura pas seulement des conséquences sur l’avenir du parti frontiste. Elle contribuera à dégonfler une de ces balivernes «hype» qui signalent les commentateurs fatigués : le fameux «dépassement du clivage droite-gauche». Florian Philippot en est l’un des hérauts. Antieuropéen et social, s’adressant au «peuple patriote» au-delà de la césure classique, son projet est en passe d’être brutalement invalidé. Il est même possible que lui-même soit expulsé du parti tel un migrant indésirable…
Beaucoup au FN imputent en effet la déconvenue présidentielle de Marine Le Pen à la rhétorique anti-euro et à la «gauchisation» du parti dont l’énarque mangeur de couscous est le théoricien. Ils veulent revenir aux «fondamentaux» frontistes : haro sur l’immigration, obsession sécuritaire, leitmotiv identitaire, cajoleries diverses à l’égard de la clientèle traditionnelle héritée du poujadisme, commerçants, artisans, indépendants, etc. C’est-à-dire revenir clairement à la droite de la droite et non plus rêver d’une improbable planète «ni droite-ni gauche» perdue dans l’espace sidéral des chimères politiques.
Dans le même temps, on s’aperçoit que l’autre apôtre du «dépassement des clivages anciens», Emmanuel Macron, mène en fait une politique libérale de centre droit, c’est-à-dire qu’il rappelle moins le Jupiter tonnant voué au renouveau de la politique que le Giscard chuintant classiquement libéral et européen. De plus en plus, En marche claudique sur sa jambe droite, dans le domaine économique et social en tout cas, confirmant le diagnostic de Mitterrand : les centristes ne sont ni de gauche ni de gauche.
Faut-il s’en étonner ? Pas vraiment : si l’on y regarde bien, le débat français sépare toujours et encore ceux qui veulent une économie libérale et une société conservatrice, et ceux qui veulent un meilleur partage et une société plus libre. En témoignent la controverse sur la loi Travail – la droite est pour, la gauche contre – ou bien celle qui se développe sur la PMA – la gauche est pour, la droite contre. Les esprits de bon sens remarqueront que toutes les grandes démocraties – toutes – se divisent politiquement entre conservateurs et progressistes, républicains et démocrates, CDU et SPD, Tories et travaillistes, pro-Trudeau et antis, etc. Pourquoi la France, qui a inventé les termes mêmes de droite et de gauche, échapperait-elle soudain à la règle ?

Et aussi

• Charlie déconcerte. Depuis toujours voué à la libération des mœurs, à l’égalité des genres, à la défense des minorités, l’hebdo ami devient soudain sérieux comme un pape pour lancer une charge peu satirique et très Manif pour tous contre la PMA que le candidat Macron a promis d’ouvrir aux femmes seules et aux homosexuelles. Cette revendication des intéressées, écrit Gérard Biard, rédacteur en chef, «est parfaitement absurde […] sauf à considérer qu’il y a bien un "droit à l’enfant" – ou plutôt un droit à produire un enfant – et que l’on veut absolument, quel qu’en soit le prix, promouvoir une société où un gosse, c’est comme une Rolex». On a déjà répondu dans cette lettre à l’argument du «droit à l’enfant» soi-disant inexistant, thèse centrale de Ludovine de la Rochère et de ses émules. Or ce droit est aujourd’hui réservé par la loi aux couples hétéros (qui peuvent recourir à la PMA, même avec donneur anonyme, c’est-à-dire sans père biologique connu) et dénié aux homosexuelles, ce qui sous-entend que les homos sont par nature des mauvais parents, ce qu’aucune étude sérieuse ne vient attester, ou des parents illégitimes, préjugé que semble partager Gérard Biard.
• Après un bon discours à l’ONU, Emmanuel Macron a répondu aux questions de Christiane Amanpour de CNN, sur sa diplomatie, mais aussi sur la politique intérieure française. Interrogé sur ce choix, le président a répondu que la presse française était «narcissique» et ne s’intéressait qu’à des histoires de communication. Attaque parfaitement gratuite : la plupart journaux ont publié de nombreux articles, dossiers, tribunes, enquêtes sur le contenu de la politique Macron, sur ses conséquences pour les Français, sur ses soubassements idéologiques ou techniques. C’est le B.A. BA de la communication aujourd’hui : pour communiquer, il faut toujours commencer par fustiger «la communication» et taper sur la presse «narcissique» et «superficielle». Dans son style plus rustique, Trump ne fait pas autre chose.
• Son siège de Solférino étant voué à la vente, le PS cherche un nouveau local national. Un responsable a suggéré de l’installer au métro Aubervilliers Front Populaire, sur la ligne 12. Un autre, plus facétieux, a suggéré la station Robespierre. On peut aussi penser à Voltaire-Léon Blum, Bibliothèque François Mitterrand, ou encore à la station Jaurès. Compte tenu de l’actuelle discrétion du parti, les mauvaises langues proposeront plutôt le métro La Muette.
LAURENT JOFFRIN
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