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lundi 21 août 2017

Appeler les choses par leur nom...


La Sociale

Analyses et débats pour le renouveau d'une pensée de l'émancipation

Appeler les choses par leur nom

Par Denis Collin • Actualités • Lundi 21/08/2017

Dans toute une partie des médias, des partis politiques et des faiseurs d’opinions de tous poils, on s’évertue à ne pas appeler les choses par leur nom. A chaque nouvel attentat commis par un ou plusieurs militants armés de la cause islamiste, on éviter autant que faire se peur de prononcer le mot « islamiste » parce que l’on craint les amalgames « islamisme = islam » et que visiblement la crainte des amalgames est bien plus forte que la crainte des attentats ! Plutôt que de désigner la cause que ces militants islamistes armés veulent promouvoir, on parle de « criminels », de « lâches », qualificatifs moraux que l’on fait suivre de qualificatifs psychiatriques (fous, psychopathes ...). On nous enjoint de croire qu’il n’y a évidemment aucun rapport entre ces fous qui conduisent des voitures folles et la cause politico-théologique dont ils se réclament. « Pas d’amalgame » et « ça n’a rien à voir avec l’islam », voilà ce qu’il faut dire dès qu’une bombe explose, que les couteaux sortent ou les camions se précipitent sur la foule. Tout au plus ira-t-on jusqu’à condamner ce « lâche terrorisme ».
La première chose qui s’impose est donc de clarifier l’usage des mots. Tout d’abord, les condamnations morales sont parfaitement inutiles et presque un peu grotesques venant de responsables politiques. On ne doute bien qu’aucun responsable ne va approuver le mitraillage à la AK47 d’une salle de spectacle et qu’il s’agit d’une chose horrible, inexcusable, répugnante, etc. Mais après ?  Ce ne sont pas des fous isolés, des psychopathes échappés d’un asile qui ont massacré des centaines de personnes au cours des deux dernières années. Ce sont des gens qui mènent une guerre, donc qui font de la politique – tant est-il que la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens. Il faut donc rester sobre sur le lexique moral et en venir à l’essentiel qui est la politique.
Le terme de « terroriste » est bien vague. Si on cherche une définition du terrorisme on en trouvera des myriades. Mais en gros on peut se mettre d’accord sur l’idée que le terrorisme est l’usage de la violence contre les populations civiles à des fins politiques et militaires. Il y a donc des terrorismes d’État (les nazis et les staliniens ont gouverné par la terreur), des actes terroristes menés pendant une guerre, actes que parfois on finira par condamner comme crimes de guerre. Certains épisodes de la Seconde Guerre mondiale comme les bombardements de Dresde et Hambourg ou les bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki, ont clairement une dimension terroriste : il s’agissait dans tous cas non pas d’atteindre des objectifs militaires mais de semer la terreur dans la population pour la dissuader de soutenir encore les gouvernements en place. Assez souvent, des mouvements de libération nationale ne s’en tiennent pas à lutte contre le pouvoir oppresseur et ses représentants, mais peuvent aussi s’en prendre aux populations civiles. Il y a aussi de nombreux cas litigieux. Les nazis et le gouvernement de Pétain qualifiaient de terroristes les résistants …  Les gouvernements français qualifiaient le FLN algérien de groupe terroriste avant de négocier avec lui l’indépendance de l’Algérie. On a qualifié de terroristes les groupes comme la RAF allemande ou les Brigades rouges italiennes qui s’en tenaient à des attentats ciblés contre les « ennemis de classe » parce qu’ils usaient de méthodes violentes alors que la voie de la contestation démocratique du système était ouverte.
Bref, les attentats djihadistes sont incontestablement terroristes. Mais on devrait éviter de les confondre avec le terrorisme de l’ETA ou de l’IRA par exemple ou de dissoudre ces actes dans le vocabulaire général et confus de la « radicalisation ». Donc s’en tenir à « terroriste », c’est encore éviter le problème. On parle de djihadistes, mais on ne fait même plus attention au sens des mots puisque le djihad est la « guerre sainte ».
Donc il faut parler de la cause politique que défendent les assassins de Charlie Hebdo, du Bataclan, de Nice ou de Barcelone (sans oublier Londres, Berlin, etc.). Ce que veulent ces gens, affiliés à DAECH ou non, c’est faire triompher l’islam et imposer à toutes les sociétés les principes de l’islam. Leurs méthodes sont évidemment abjectes mais c’est le projet lui-même, indépendamment des méthodes qui doit être résolument combattu, parce qu’il s’agit d’un projet totalitaire, fondé sur la domination totale des corps et des esprits et l’institution de l’enfermement des femmes.
Mais c’est là que les choses se corsent. Car le projet des djihadistes de DAECH et autres groupes proches ne se distingue que par des subtilités rhétoriques du wahhabisme qui gouverne les pays du Golfe ou encore des discours des Frères Musulmans, spécialistes de la dissimulation qui montrent leur vrai visage aujourd’hui en Turquie. Lesquels d’ailleurs ne diffèrent que d’assez peu de ce qui disent les « modérés » officiels en France ou ailleurs. Ils sont tous partisans de voiler les femmes et même maintenant dès cinq ou six ans. Ils tiennent à la charia qui stipule qu’en matière d’héritage une femme vaut la moitié d’un homme. Ils considèrent tous qu’on naît musulman dès lors que le père est musulman, que l’apostasie est un crime (théoriquement punissable de mort) et qu’une fille musulmane ne peut sous peine de déshonorer sa famille se marier avec un « kufr » chrétien ou athée.
Bien sûr tous ces bons modérés détestent les djihadistes qui, par leurs actions meurtrières, pourraient susciter dans la population des réactions d’hostilité à l’islam. Il existe aussi, beaucoup de musulmans à qui tout cela pèse mais qui n’osent rien dire parce que la communauté exerce souvent une véritable tyrannie sur les individus. Il existe aussi une minorité de courageux qui voudraient sauver l’islam comme religion du cœur en balançant une bonne partie du corpus doctrinal et des prescriptions alimentaires, d’habillement ou de mariage. Mais ces derniers sont dans une situation difficile et pourraient bien déjà avoir perdu, car, après tout, ce n’est pas la première fois qu’est tentée une réforme de l’islam et là ce sont surtout les partisans de la « sunna », la tradition, qui ont le vent en poupe. Il y a du reste un problème de fond. Théologiquement, l’islam n’apporte rien par rapport au judaïsme ou au christianisme (ce serait une sorte de christianisme arien (si on veut revenir aux débats christologiques des premiers siècles). Ce qui fait la spécificité de l’islam, c’est justement sa stratégie de conquête et son projet politique. Un islam réformé devrait devenir « tolérant » et ressemblerait fortement au protestantisme libéral.
Derrière les djihadistes, il y a donc toute la stratégie théologico-politique propre à l’islam et les forces du capitalisme islamique. Voilà la réalité qu’il faut regarder en face et que, malheureusement, la plupart de nos politiques ne veut pas voir. On le sait, les USA ont soutenu le projet stratégique de l’islam conquérant. Ils l’ont soutenu contre le « communisme », contre toutes les mouvements de libération nationale, vaguement laïcs et vaguement socialisants. Les capitalistes pensent que le saint Marché et le saint Qoran sont une seule et même divinité ! Et certains patrons ne sont pas insensibles à l’esprit de soumission que l’islam pourrait amener dans les entreprises.
Alors nous disent certains, parler des terroristes islamistes et de leurs fournisseurs idéologiques, ce serait leur donner trop d’importance. A suivre ce genre de raisonnement, il eût fallu éviter de parler des fascistes et des nazis… et effectivement à l’époque les gros malins ne manquaient pas qui trouvaient que l’on donnait trop d’importance à ces excités. A toutes ces belles âmes de gauche, attendries par le premier imam venu en qui ils voient un porte-parole des opprimés, posons quelques questions. Supposons qu’un parti français déclare que les Noirs valent la moitié d’un Blanc et qu’ils doivent circuler bien enveloppés et bien encapuchonnés car la couleur de leur peau offense la pudeur commune. Supposons qu’un parti national français s’oppose aux mariages mixtes pour ne pas laisser se diluer la pureté de la race française.  Supposons que le même parti exige que les enseignements de l’horrible Darwin soient abandonnés et que la science est entièrement contenue, disons, dans les évangiles. Un tel parti existe plus ou moins en France, entre les identitaires et les intégristes catholiques de la pire espèce. Mais là, pas de problème, la vigilance antifasciste s’exerce ! Mais si on remplace Noir par femme, chrétien par musulman et évangile par Coran, on a tout simplement la vaste galaxie des associations islamiques, et là nos antifascistes vigilants leur trouvent mille et une vertus ! Ceux qui dessinent des moustaches d’Hitler sur les affiches de Marine Le Pen (ce qui n’a vraiment aucun sens) sont prêts à faire des réunions publiques en compagnie de M. Ramadan qui se pose la question de savoir s’il faut un moratoire sur la lapidation des femmes « adultères ». Les féministes absurdissimes qui tentent d’imposer cette horreur qu’est l’écriture dite « inclusive » pour obtenir l’absolue parité grammaticale du féminin et du masculin, en viennent à défendre le voile, le mariage forcé et l’excision comme des formes honorables de la résistance culturelle des « racisés » face au racisme « post-colonial » !
Il faut dire clairement que la stratégie théologico-politique de l’islam est le terreau du djihadisme et qu’elle représente un danger majeur pour ceux qui croient encore à la valeur des idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité. Et si l’islam veut trouver une place dans les sociétés libérales pluralistes qui sont les nôtres, il ne le pourra que par une réforme profonde qui lui fasse reconnaître la valeur de la liberté des individus, la suprématie des lois républicaines et le pouvoir de la raison.
Denis Collin – 21 août 2017

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