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mercredi 31 mai 2017

Les Crises.fr - Le massacre silencieux de la guerre aérienne des Etats-Unis, par Nicolas J. S. Davies


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31
Mai
2017

Le massacre silencieux de la guerre aérienne des Etats-Unis, par Nicolas J. S. Davies


Source : Consortium News, 07-05-2017
Exclusif : Les médias mainstream américains s’offusquent bruyamment quand les avions de chasse russes tuent des civils à Alep, mais deviennent soudainement silencieux quand les avions américains massacrent des innocents à Mossoul et Raqqa, note Nicolas J. S. Davies.
Par Nicolas J. S. Davies
Avril 2017 a été encore un mois de massacres de masse et de terreur inimaginable pour la population de Mossoul en Irak, et des zones autour de Raqqa et Tabqa en Syrie, tandis que la campagne la plus soutenue et la plus violente de bombardements américaine depuis la guerre du Vietnam, entrait  dans son 33e mois.


Photo by Navy Petty Officer 2nd Class Dominique A. Pineiro)
Le général du Corps des Marines Joe Dunford, Chef d’Etat-major des Armées, rencontre les membres de la coalition dans une base d’opérations avancées près de Qayyarah Ouest en Irak, le 4 avril 2017.
Le groupe de surveillance de la guerre aérienne “Airwars” a cumulé des rapports indiquant 1280 à 1744 civils tués par au moins 2237 bombes et missiles largués par des avions de chasse américains et alliés en avril (1609 en Irak et 628 en Syrie). Le nombre  le plus important  de victimes est dans et autour du Vieux Mossoul et de Mossoul Ouest, où l’on a compté entre 784 et 1074 morts civiles, mais il y a eu de nombreuses victimes civiles dans la zone autour de Tabqa en Syrie.
Dans d’autres zones de combat, comme je l’ai expliqué dans des articles précédents (ici et là), cette sorte de “rapports passifs” de morts civils cumulés par Airwars n’a jamais pris en compte que 5% à 20% des morts civils réels,  comme l’a révélé une étude de mortalité générale. Iraqbodycount, qui utilise une méthodologie similaire à celle d’Airwars, a seulement pris en compte 8% des morts révélés  en 2006 par une étude de la mortalité dans l’Irak occupé.
Airwars semble accumuler les rapports de morts civils plus sérieusement qu’Iraqbodycount il y a 11 ans, mais il classe un grand nombre d’entre eux comme  “contestables” ou “peu fiables”, et reste délibérément prudent dans son décompte. Par exemple, dans certains cas, il a compté des rapports des médias locaux mentionnant “beaucoup de morts” pour un seul mort, sans chiffre maximum. Ce n’est pas pour mettre en cause les méthodes de Airwars, mais pour souligner ses limites dans la contribution à une estimation réelle des morts civils.
En s’autorisant plusieurs interprétations des données d’Airwars et en supposant que comme d’autres tentatives de quantifications faites précédemment, elles retiennent entre 5% et 20% des morts réels, une sérieuse estimation du nombre de civils tués par la campagne de bombardements menée par les Américains depuis 2014, devrait maintenant  se situer entre 25 000 et 190 000 morts
Le Pentagone a récemment revu son estimation fantaisiste du nombre de civils qu’il a tués en Irak et en Syrie depuis 2014, à 352. C’est moins d’un quart des 1446 victimes que Airwars a identifiées par leur nom, de manière irréfutable.
Airwars a aussi collecté les chiffres des civils tués par les bombardements russes en Syrie, qui dépassent les chiffres des civils tués par les bombardements menés par les Etats-Unis pendant presque toute l’année 2016. Cependant, depuis que les bombardements menés par  Etats-Unis ont ajouté plus de 10 918 bombes et missiles lâchés durant le premier trimestre de 2017, le plus fort bombardement depuis le début de la campagne en 2014, les rapports de Airwars sur les civils tués par les bombardements américains dépassent le décompte des morts causés par les bombardements russes.
A cause de la nature fragmentaire des rapports de Airwars, ce modèle peut, ou ne peut pas, indiquer précisément si les Etats-Unis ou les Russes ont vraiment tué plus de civils dans chacune de ces périodes. De nombreux facteurs peuvent affecter ce résultat.
Par exemple, les gouvernements occidentaux et les ONG ont financé et soutenu les Casques Blancs et autres groupes qui ont rapporté les morts civils causés par les bombardements russes, mais il n’y a pas de soutien équivalent de la part des Occidentaux pour rapporter les morts civils dans les zones tenues par l’Etat islamique que les Etats-Unis et ses alliés bombardent. Si, à cause de tels facteurs, les rapports de Airwars retiennent une plus grande proportion des morts réels dans une zone plus que dans une autre, cela peut conduire à une différence entre les nombres des morts rapportés, qui ne correspond pas à la différence des morts réels.
Choc, Terreur …et Silence
Pour mettre en perspective les 79 000 bombes et missiles avec lesquels les États-Unis et ses alliés ont bombardé l’Irak et la Syrie depuis 2014, il convient de réfléchir aux jours “plus innocents” de “Choc et  Terreur” (Shock and Awe) en mars 2003. Comme le journaliste de NPR Sandy Tolan l’a rapporté en 2003, l’un des architectes de cette campagne prévoyait que lancer 29 200 bombes et missiles sur l’Irak serait “l’équivalent non nucléaire de l’impact que les armes atomiques lancées à Hiroshima et Nagasaki ont eu sur le Japon“.

Au début de l’invasion américaine de l’Irak en 2003, le président George W. Bush a ordonné aux militaires américains de mener une attaque aérienne dévastatrice contre Bagdad, connue sous le nom de “Choc et Terreur”.
Lorsque la campagne “Choc et Terreur” a été déclenchée contre l’Irak en 2003, elle a dominé les nouvelles dans le monde entier. Mais après huit ans de guerre “dissimulée, tranquille, sans médias“, sous le mandat du président Obama, les médias américains ne traitent même plus comme des nouvelles la boucherie quotidienne que réalisent ces bombardements plus lourds et plus soutenus contre l’Irak et la Syrie. Ils couvrent pendant quelques jours les massacres de masse isolés, puis reprennent rapidement la programmation normale du “Trump Show”.
Comme dans “1984” de George Orwell, le public sait que nos forces militaires sont en guerre contre quelqu’un quelque part, mais les détails sont rares. “Est-ce encore d’actualité ? N’est-ce pas la Corée du Nord, le gros problème aujourd’hui ?”
Il n’y a presque pas de débat politique aux États-Unis sur les réussites et les erreurs de la campagne de bombardement des États-Unis en Irak et en Syrie. Peu importe que le bombardement de la Syrie sans l’autorisation de son gouvernement internationalement reconnu soit un crime d’agression et une violation de la Charte de l’ONU. La liberté des États-Unis de violer à loisir la Charte des Nations Unies a déjà été politiquement (pas juridiquement !) normalisée par 17 ans d’agressions en série, depuis le bombardement de la Yougoslavie en 1999 jusqu’aux invasions de l’Afghanistan et de l’Irak, puis aux frappes de drones au Pakistan et au Yémen.
Alors, qui fera maintenant respecter la Charte pour protéger les civils en Syrie, qui sont déjà confrontés à la violence et à la mort de tous les côtés dans une sanglante guerre civile et par procuration, dont les États-Unis étaient déjà entièrement complices, bien avant de commencer à bombarder la Syrie en 2014 ?
Suivant le droit américain, trois gouvernements successifs des États-Unis ont affirmé que leur violence sans contrainte est légalement justifiée par l’Autorisation pour l’Utilisation de la Force Militaire (AUMF) adoptée par le Congrès américain en 2001. Mais en balayant le fait que la loi disait seulement :
Que le Président est autorisé à utiliser toute la force nécessaire et appropriée contre les nations, les organisations ou les personnes qu’il prouve avoir planifié, autorisé, commis ou aidé les attentats terroristes survenus le 11 septembre 2001, ou avoir abrité de telles organisations ou personnes, afin de  prévenir tout acte futur de terrorisme international contre les États-Unis par ces nations, organisations ou personnes“.
Combien parmi les milliers de civils  tués par les États-Unis à Mossoul au cours des derniers mois ont-ils joué un tel rôle dans les attentats terroristes du 11 Septembre ? Toute personne lisant ceci connaît la réponse à la question : probablement pas un seul. Si l’un d’entre eux était impliqué, ce serait par pure coïncidence.
Tout juge impartial rejetterait l’allégation selon laquelle cette loi autorisait 16 ans de guerre dans au moins huit pays, le renversement de gouvernements qui n’avaient rien à voir avec le 11 Septembre, le meurtre d’environ 2 millions de personnes et la déstabilisation de pays, l’un après l’autre – aussi certainement que les juges de Nuremberg ont rejeté les allégations des accusés allemands selon lesquelles ils avaient envahi la Pologne, la Norvège et l’URSS pour empêcher ou “devancer” des attaques imminentes contre l’Allemagne.
Les responsables des États-Unis peuvent prétendre que l’AUMF irakien de 2002 légitime le bombardement de Mossoul. La loi fait pour le moins  référence au même pays. Mais, comme c’est aussi toujours d’actualité, le monde entier a su, dans les mois qui suivirent, qu’elle reposait sur de fausses prémisses et sur des mensonges absolus pour justifier le renversement d’un gouvernement que les États-Unis ont depuis détruit.
La guerre des États-Unis en Irak a officiellement pris fin en 2011, avec le retrait des dernières forces d’occupation américaines. L’AUMF n’avait pas et ne pouvait pas approuver l’alliance avec un nouveau régime en Irak 14 ans plus tard, pour attaquer l’une de ses villes et tuer des milliers de ses citoyens.
Pris dans les filets de la  propagande de guerre
Ne savons-nous pas ce qu’est vraiment la guerre ? Y a-t-il trop longtemps que les Américains ne l’ont pas connue sur leur propre sol ? Peut-être. Mais aussi heureusement éloignée que soit la guerre de la plupart de nos vies quotidiennes, nous ne pouvons pas prétendre que nous ne savons pas ce qu’elle est et quelles horreurs elle charrie.

Les photos des victimes du massacre de My Lai au Vietnam ont électrisé la sensibilité du public à la barbarie de la guerre. (Photo prise par un photographe de l’armée US Ronald L. Haeberle)
Ce mois-ci, deux amis et moi-même avons été reçus par le Bureau de notre députée en tant que représentants de notre comité local d’Action pour la Paix (Paix, Justice et  Développement durable de Floride), pour lui demander de co-parrainer une loi interdisant une première frappe nucléaire américaine ; d’abroger l’AUMF de 2001 ; de voter contre le budget militaire ; de supprimer le financement du déploiement de troupes terrestres américaines en Syrie ; et de soutenir la diplomatie, et non pas la guerre, avec la Corée du Nord.
Quand un de mes amis a expliqué qu’il avait combattu au Vietnam et a commencé à parler de ce dont il avait été témoin là-bas, il a dû s’arrêter pour ne pas pleurer. Mais la personne de l’équipe n’avait pas besoin qu’il continue. Elle savait de quoi il parlait. Nous le savons tous.
Mais s’il faut que nous voyions tous des enfants morts et blessés dans leur chair pour saisir l’horreur de la guerre et prendre des mesures sérieuses en vue de l’arrêter et de l’empêcher, alors nous sommes confrontés à un avenir sombre et sanglant. Comme mon ami et beaucoup d’autres comme lui l’ont appris à un coût incalculable, le meilleur moment pour arrêter une guerre, c’est avant qu’elle ne commence, et la principale leçon à tirer de toute guerre est : “Plus jamais ça !”
Barack Obama et Donald Trump ont remporté la présidence en partie en se présentant comme les candidats de la “paix”. Il s’agissait d’un élément soigneusement calculé et étalonné dans leurs deux campagnes, compte tenu des positions pro guerre de leurs adversaires principaux, John McCain et Hillary Clinton. L’aversion pour la guerre  de la population américaine est un facteur dont chaque président et politicien américain doit tenir compte ; promettre la paix avant de nous lancer dans la guerre est une tradition politique américaine qui remonte à Woodrow Wilson et Franklin Roosevelt.
Comme le Reichsmarschall Hermann Goering l’a admis dans sa cellule à Nuremberg devant le psychologue militaire américain Gustave Gilbert : “Naturellement, les gens ordinaires ne veulent pas de la guerre ; ni en Russie, ni en Angleterre, ni en Amérique, ni en Allemagne. C’est bien compris. Mais, après tout, ce sont les dirigeants du pays qui déterminent la politique et il est toujours simple d’entraîner les gens, qu’il s’agisse d’une démocratie ou d’une dictature fasciste ou d’un Parlement ou d’une dictature communiste“.
“Il y a une différence”, a déclaré Gilbert : “Dans une démocratie, les gens ont leur mot à dire à travers leurs représentants élus, et aux États-Unis, seul le Congrès peut déclarer la guerre”.
Goering n’a pas été impressionné par les garanties constitutionnelles chères à Madison et à Hamilton. “Oh, tout cela est bel et beau”, a-t-il répondu, “mais, voix ou pas voix, les gens peuvent toujours être impliqués dans les enchères de leurs dirigeants. C’est facile. Tout ce que vous avez à faire, c’est leur dire qu’ils sont attaqués et dénoncer les pacifistes pour leur manque de patriotisme, qui expose le pays au danger. Cela fonctionne de la même manière dans n’importe quel pays“.
Notre engagement envers la paix et notre répugnance à la guerre sont trop facilement compromis par les techniques simples mais intemporelles décrites par Goering. Aux États-Unis aujourd’hui, elles sont renforcées par plusieurs autres facteurs, dont la plupart ont également eu des parallèles dans l’Allemagne de la Seconde Guerre mondiale:
– Les médias de masse qui répriment la sensibilité du public aux coûts humains de la guerre, en particulier lorsque la politique des États-Unis ou les forces américaines en sont responsables.
-Le black-out médiatique sur les voix de la raison qui préconisent des politiques alternatives fondées sur la paix, la diplomatie ou les règles du droit international.
– Dans le silence qui en résulte sur les alternatives rationnelles, les politiciens et les médias présentent “faire quelque chose”, c’est-à-dire la guerre, comme la seule alternative à l’éternel épouvantail : “ne rien faire”.
– La normalisation de la guerre par la discrétion et la tromperie, en particulier par des personnalités publiques considérées par ailleurs comme dignes de confiance, tel le président Obama.
-La dépendance des politiciens et des organisations progressistes au financement par les syndicats, qui sont devenus des partenaires juniors dans le complexe militaro-industriel.
– Le cadrage politique des différends entre l’Amérique et d’autres pays comme résultant entièrement des actions de l’autre bord, et la diabolisation des dirigeants étrangers pour dramatiser et populariser ces faux récits.
– Le prétexte que le rôle des États-Unis dans les guerres d’outremer et l’occupation militaire mondiale découle d’un désir bien intentionné d’aider les gens, et non des ambitions stratégiques et des intérêts commerciaux américains.
Au total, cela équivaut à un système de propagande de guerre, dans lequel les chefs des réseaux de télévision sont responsables des atrocités qui en résultent autant que les dirigeants politiques et militaires. Faire rabâcher par des généraux retraités un jargon plein d’euphémismes  pour bombarder le front intérieur, sans divulguer les forts honoraires que les administrateurs et les consultants reçoivent des fabricants d’armes, n’est qu’une des faces de la pièce.
Le revers tout aussi important est l’échec des médias à seulement couvrir les guerres ou le rôle qu’y jouent les États-Unis, et la marginalisation systématique de quiconque suggère qu’il y a quelque chose de moralement ou légalement erroné dans les guerres américaines.
Le pape et Gorbatchev
Le pape François a récemment suggéré qu’un tiers pourrait servir de médiateur pour aider à résoudre le conflit de près de 70 ans entre notre pays et la Corée du Nord. Le pape a suggéré la Norvège. Plus important encore, le Pape a présenté le problème comme un différend entre les États-Unis et la Corée du Nord, et non pas, ainsi que le font les États-Unis, comme un problème ou une menace pour le reste du monde que poserait la Corée du Nord.

Le pape François
Voilà comment la diplomatie fonctionne le mieux, en identifiant de manière correcte et honnête les rôles que les différentes parties jouent dans une dispute ou un conflit, puis en travaillant à résoudre les désaccords et les intérêts en conflit de manière à ce que les deux parties puissent s’en satisfaire et même en bénéficier. Le JCPOA qui a résolu le différend américain avec l’Iran sur son programme nucléaire civil est un bon exemple de la façon dont cela peut fonctionner.
Cette forme  réaliste de diplomatie est loin des surenchères, des menaces et des alliances agressives qui ont été maquillées en diplomatie sous une série de présidents et de secrétaires d’État américains depuis Truman et Acheson, à quelques exceptions près. Le désir persistant d’une grande partie de la classe politique des États-Unis de compromettre le JCPOA avec l’Iran témoigne bien de la façon dont les responsables américains s’accrochent à l’utilisation des menaces et des surenchères, et s’offensent de ce que les États-Unis, Etat  “exceptionnel”, doivent descendre de leur cheval blanc et négocier de bonne foi avec les autres pays.
À l’origine de ces politiques dangereuses, comme l’historien William Appleman Williams l’a écrit en 1959 dans “The Tragedy of American Diplomacy” (La tragédie de la diplomatie américaine), le mirage du pouvoir militaire suprême a séduit les dirigeants américains après la victoire alliée dans la Seconde Guerre mondiale et l’invention des armes nucléaires. Après avoir survécu à la réalité vietnamienne d’un monde post-colonial invaincu, ce rêve américain du pouvoir ultime s’est évanoui rapidement, pour renaître vindicativement après la fin de la guerre froide.
Tout comme la défaite de l’Allemagne durant la Première Guerre mondiale n’était pas assez décisive pour la convaincre que ses ambitions militaires étaient condamnées, une nouvelle génération de dirigeants américains a vu la fin de la Guerre froide comme une chance de “virer le syndrome du Vietnam” et de relancer l’offre tragique par l’Amérique d’une “domination à spectre large” (full spectrum dominance).
Lors d’un discours à Berlin en 2014 pour le 25e anniversaire de la chute du mur de Berlin, Mikhail Gorbatchev se désolait ainsi : “L’Occident et surtout les États-Unis ont proclamé leur victoire dans la Guerre froide. L’euphorie et le triomphalisme sont montés à la tête des dirigeants occidentaux. En profitant de l’affaiblissement de la Russie et du manque de contre-pouvoirs, ils ont revendiqué le monopole du leadership et la domination sur le monde, refusant d’entendre les propos de prudence de nombre de ceux qui sont présents ici”.
Ce triomphalisme post-Guerre froide nous a précisément conduits à un labyrinthe encore plus tortueux de délires, de catastrophes et de dangers que la Guerre froide elle-même. La folie des ambitions insatiables de nos dirigeants et de leur flirt répété avec l’extinction de masse ne peut être mieux symbolisée que par le Bulletin de l’horloge Doomsday des scientifiques atomiques, dont les aiguilles sont de nouveau à deux minutes et demie de minuit.
L’incapacité de la machine de guerre la plus coûteuse jamais assemblée à vaincre des forces de résistance légèrement armées, pays après pays, ou à rétablir la stabilité dans l’un des pays qu’elle a détruits, n’a guère entamé, à intérieur, le pouvoir du complexe militaro-industriel américain sur nos institutions politiques et nos ressources nationales. Ni des millions de morts, ni des milliards de dollars gaspillés, ni l’aveu d’un échec abject n’ont ralenti l’extension et l’escalade stupide de la “guerre mondiale contre le terrorisme”.
Les futurologues se demandent si la technologie robotique et l’intelligence artificielle mèneront un jour à un monde dans lequel des robots autonomes pourraient lancer une guerre pour asservir et détruire la race humaine, peut-être même en incorporant des humains comme composants des machines qui entraîneront notre extinction. Avec les forces armées américaines et le complexe militaro-industriel, n’avons-nous pas déjà créé exactement cet organisme, semi humain et semi technologique, qui ne s’arrêtera pas de bombarder, de tuer et de détruire à moins et jusqu’à ce que nous l’arrêtions pour le démanteler ?
Nicolas J. S. Davies est l’auteur de “Du sang sur nos mains : l’invasion américaine et la destruction de l’Irak” (Blood On Our Hands : the American Invasion and Destruction of Iraq). Il a également écrit les chapitres sur “Obama en guerre” dans “Evaluer le 44e président : un bulletin sur le premier mandat de Barack Obama en tant que chef progressiste” (Grading the 44th President : a Report Card on Barack Obama’s First Term as a Progressive Leader).
Source : Consortium News, 07-05-2017

30 réponses à Le massacre silencieux de la guerre aérienne des Etats-Unis, par Nicolas J. S. Davies

Commentaires recommandés


Georges ClounaudLe 31 mai 2017 à 07h12
Allo Raphaël Glucksmann ? Allo ? Où es-tu ? On ne t’entend pas ?
Pourtant “Mossoul crève ! Mobilisons-nous” ! Excuse-moi je me suis permis de reprendre ton coup de gueule du Monde de décembre dernier et j’ai remplacé Alep par Mossoul.
http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/12/13/alep-creve-mobilisons-nous-par-raphael-glucksmann-et-yannick-jadot_5048441_3232.html
Je ne suis qu’un modeste sans-dent et je n’ai pas tes “lumières” mais il me semble que ça marche aussi. Je reprends :
“Mossoul crève sous nos yeux. Nous assistons en direct à l’éradication d’une population. Mossoul crève et emporte dans ses ruines, avec les milliers d’enfants, de femmes et d’hommes que nous laissons mourir, l’idée même de droit international. […] Raser une ville, ses écoles, ses hôpitaux, ce n’est pas lutter contre le terrorisme, c’est du terrorisme […] Et la communauté internationale regarde, hébétée, inutile, incapable d’imposer un cessez-le-feu ou d’organiser l’évacuation des civils pris au piège.”

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