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jeudi 29 octobre 2015

“Pepe” Mujica appelle la jeunesse à s’engager à l’approche de la COP 21

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“Pepe” Mujica appelle la jeunesse à s’engager à l’approche de la COP 21

29/10/2015 | 17h55

"Pepe" Mujica en mai 2015 à Buenos Aires (Marcos Brindicci/Reuters)

L’ex-président uruguayen a délivré un discours plein d’espoir et d’humanisme lors d’une rencontre avec Jean-Luc Mélenchon, à Paris.

La vie de José “Pepe” Mujica est si romanesque que, pour les fins connaisseurs de l’Amérique latine, il est devenu une légende vivante. Ancien militant des Tupamaros, la principale guérilla urbaine de l’Uruguay, il aurait encore trois balles dans le corps, sur les six qu’il a reçu au cours de la lutte armée. Prisonnier-otage de la junte militaire de 1973 à 1985, il passa deux ans au fond d’un puits dans lequel l’eau montait jusqu’à son ventre selon les aléas de la marée. A sa libération, il s’en fallu de peu pour qu’il ne bascule pas définitivement dans la folie.
Désormais âgé de quatre-vingts ans, et son mandat présidentiel achevé en ce début d’année, ce vieil homme aux cheveux blancs, aux yeux noirs et à l’éternelle moustache porte encore haut l’étendard de l’émancipation humaine partout où il le peut.
“Ceux qui perdent sont ceux qui ne se battent pas”
De passage à Paris, il a rencontré Jean-Luc Mélenchon lors d’une conférence à l’Ecole de Médecine de Paris ce 29 octobre, qui avait vocation à inaugurer un cycle de manifestations dans le cadre de la COP 21.
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Lucía Topolansky, Eric Coquerel, Pepe Mujica et Jean-Luc Mélenchon (photo : Mathieu Dejean)
A cette occasion, ce héros méconnu de l’Amérique latine” est revenu sur son expérience et a encouragé les jeunes générations à s’engager :
“J’ai dû vivre treize ou quatorze ans en prison, sans livres ni communication. Je n’avais pas d’autre solution que la réflexion et l’introspection pour trouver les forces pour survivre. Ce furent les années les plus fécondes de ma vie. Ces péripéties m’ont appris que ceux qui perdent sont ceux qui ne se battent pas, ceux qui démissionnent. Et cela ne s’applique pas seulement à la politique mais aussi au travail, ou encore à l’amour. La vie est pleine d’échecs et d’interrogations. Il faut recommencer, inlassablement”.
La cote de popularité de Pepe Mujica est montée en flèche en 2014, quand il a fait de l’Uruguay le premier pays du monde à légaliser le cannabis pour lutter contre le trafic de drogues. L’attention médiatique s’était alors portée sur ce personnage atypique, qui reversait 90 % de son indemnité présidentielle, d’un montant de 260 259 pesos (10 200 euros), habitait dans une ferme aux environs de Montevideo et conduisait une Coccinelle bleue de 1987.
“Nous sommes tous dans le même bateau, la planète Terre”
Devant un amphithéâtre comble – au premier rang duquel figuraient sa femme, l’ex-militante des Tupamaros et ex-présidente du Sénat uruguayen Lucía Topolansky, et des dirigeants du Parti de gauche -, “Pepe” s’est livré à une critique virulente de la société de consommation et de l’incapacité des gouvernements à mettre leurs intérêts nationaux de côté pour régler la question climatique et agir dans le sens du progrès humain :
“Nous n’avons jamais été aussi riches qu’aujourd’hui, mais il faut utiliser ces richesses en faveur de l’humanité, pas en faveur du marché. Les pauvres d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie ne sont pas d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie : ils font partie de l’humanité. Nous sommes tous dans le même bateau, la planète Terre, et nous sommes responsables de la vie des membres de l’équipage de ce bateau. Un geste de civilisation qui doit changer la politique telle qu’elle est conduite aujourd’hui.”
“On ne construit pas des édifices socialistes avec des maçons capitalistes”
Pour expliquer les étapes nécessaires à un tel changement, Mujica a amusé l’assistance avec une des métaphores dont il a le secret : “Nous n’allons pas améliorer le monde si nous ne luttons pas d’abord pour nous améliorer nous mêmes. On ne construit pas des édifices socialistes avec des maçons capitalistes qui en volent les planches au fur et à mesure”.
Encore une fois, après la Grèce, c’est dans un petit pays – le deuxième plus petit de l’Amérique du sud – que la gauche française va puiser son inspiration. Mais, comme en Grèce jusqu’à l’explosion récente de Syriza, la configuration partisane uruguayenne a de quoi faire pâlir le Front de gauche, dont la cohésion est perpétuellement instable.
“Pepe” Mujica est en effet membre du Frente Amplio, une coalition qui représente tout l’éventail de la gauche uruguayenne, des communistes aux sociaux-démocrates. “Ils ont eu la patience de se supporter pendant quarante ans avant de prendre le pouvoir. Nous sommes bien loin de ça”, a commenté, amère, Jean-Luc Mélenchon.

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