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samedi 31 janvier 2015

Grèce : faites des réserves de papier toilette! La gauche arrive!

Le Huffington Post


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Grèce : faites des réserves de papier toilette! La gauche arrive!

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SYRIZA

WASHINGTON – La Grèce, qui a inventé la démocratie et la dramaturgie, nous en offre aujourd’hui une synthèse passionnante qui s’exprime à travers l’hystérie des partisans de l’austérité.
Confrontés à une croissance anémique et une dette écrasante, les dirigeants "pro-austérité" grecs, espagnols, français, britanniques et, encore récemment, japonais ont opéré des coupes franches dans les dépenses sociales et assoupli les contraintes pour les entreprises.
Mais la résistance s’organise pour tenter de faire baisser le chômage, surtout chez les jeunes, d’autant que la récession menace à nouveau plusieurs pays. Depuis dimanche, la Grèce a un nouveau Premier ministre, Alexis Tsipras, 40 ans. Cet homme de gauche a promis de renégocier les 241 milliards d’euros de la dette publique, tout en revalorisant les salaires des fonctionnaires et en relançant les dépenses de l’Etat.
Confrontés à des politiciens comme M. Tsipras, les partisans de l’austérité en Grèce, à travers l’Europe, et dans le reste du monde poussent des cris d’orfraie. La plupart de leurs prédictions sont amusantes, exagérées, fantaisistes ou tout simplement erronées.
Les rédacteurs des différentes éditions internationales du Huffington Post ont compilé pour vous le livret ci-dessous (et recensé les raisons expliquant pourquoi il n’est pas nécessaire de s’affoler).
Attention à la pénurie de papier toilette !
A l’approche des législatives, une partisane de l’austérité a suggéré à ses concitoyens de faire des réserves de papier toilette parce que la clique de Tsipras allait faire du pays un nouveau Vénézuéla, où les produits de première nécessité sont rationnés, y compris — vous l’aurez deviné — le papier toilette.
Pourtant, jusqu’à présent, de telles pénuries n’ont été constatées que dans les pays où les partisans de l’austérité étaient au pouvoir. On dit par exemple qu’ils sont responsables de cette situation dans les écoles de Catalogne.
Or, quand M. Tsipras a pris ses fonctions, il s’est aperçu que le gouvernement sortantavait emporté tous les produits de toilette. "Ils ont tout pris", a-t-il déclaré. "J’ai mis une heure à trouver du savon. "» En ce qui concerne le papier toilette, nous n’avons pas d’informations précises à vous communiquer pour le moment…
Au secours ! Voilà les Communistes !
Depuis la chute de l’Union soviétique et la montée en puissance, en Chine, de la loi du marché, les capitalistes européens (sans parler des autres) ont de plus en plus de mal à agiter le spectre du communisme. Les partisans de l’austérité ont donc commencé à diaboliser leurs adversaires politiques.
En dépit de la profonde influence historique des communistes grecs, les vieux discours alarmistes n’ont pas fonctionné – peut-être parce que les partisans de l’austérité avaient du mal à accorder leurs violons, décrivant tour à tour leurs ennemis comme des Communistes d’une redoutable efficacité ou des universitaires naïfs et incompétents. Au vu du gouvernement constitué par M. Tsipras, on pencherait plutôt pour des économistes et des professeurs empreints d’idéalisme.
Au secours ! Voilà Poutine !
C’est vrai, l’Union soviétique n’existe plus. Mais il y a Vladimir Poutine, et certains laissent entendre qu’il serait en train de s’immiscer dans les affaires de la Grèce et d’autres pays en quête de solutions pour se libérer de la dette accablante qu’ils ont contractée auprès de l’Union européenne ou d’autres organismes occidentaux.
Cependant, avec la chute des prix du pétrole et du gaz, la Russie n’est plus en mesure de jouer les prêteurs en dernier ressort. Même pour la Grèce ou tout autre pays que les chars de Poutine n’ont pas encore envahi. Les Cubains eux-mêmes ont fait une croix sur les Russes, leur préférant le Vénézuéla et, aujourd’hui, l’Oncle Sam.
Au secours ! Voilà les Nazis !
En Grèce, le parti de M. Tsipras s’est fait des alliés – mais pas nécessairement des amis – dans l’extrême droite ultranationaliste, qui déteste les emprunts à l’étranger pour des motifs xénophobes plutôt qu’économiques. Certains en ont conclu que le mouvement anti-austérité finirait par ramener l’extrême-droite au pouvoir.
Mais il n’est pas besoin d’être un crétin d’extrême-droite pour s’indigner du fait que la Chine a beaucoup à gagner de la privatisation du port du Pirée, une des solutions avancées par les partisans de l’austérité pour sauver la Grèce.
La résurgence actuelle de l’extrême-droite en Europe n’est pas due au message anti-austérité de la gauche. En France, notamment, plusieurs facteurs expliquent cette progression, et pourquoi la plupart des Français en sont horrifiés. "Ce qui nous inquiète avant tout, c’est la montée de l’extrême droite", explique Anne Sinclair, la directrice éditoriale du Huffington Post français.
L’épidémie grecque va se répandre !
Le parti Syriza de M. Tsipras a un équivalent espagnol, Podemos. Les sondages témoignent de l’attrait croissant de cette formation, ce qui pourra se vérifier lors des élections régionales du 22 mars en Andalousie, et dans le reste du pays le 26 mai.
Mais les conservateurs et les socialistes espagnols clament d’une seule voix que "l’Espagne n’est pas la Grèce", explique Montserrat Dominguez, le directeur éditorial du Huffington Post ibérique, qui vit à Madrid.
La dette du pays n’est pas aussi conséquente que celle de la Grèce, et les dirigeants espagnols continuent de penser que le taux de croissance tournera autour de 2% cette année. Ils affirment que cela permettra de créer 800 000 emplois, et que le chômage redescendra à 22% (un chiffre bien sûr déprimant mais qui évitera peut-être un raz-de-marée Podemos).
Ailleurs dans le monde, le Japon a renoncé à l’austérité il y a plusieurs années, et il semble que le président américain, Barack Obama, veuille aujourd’hui en faire de même.
C’est la fin de l’Union européenne !
Il est tout à fait possible que l’Union européenne, déjà bien éprouvée, s’effondre, et que la Grèce soit l’élément déclencheur de sa disparition. Certains pensent que le pays devra sortir de la zone euro, entraînant plusieurs nations dans sa chute. D’autres, que l’Union européenne sera amenée à faire preuve de souplesse, ce qui aura des conséquences tout aussi fâcheuses.
Mais ces deux scénarios minimisent, voire ignorent, le pragmatisme et la finesse des dirigeants et des institutions européennes. Ce n’est pas pour rien que l’Union européenne est aujourd’hui la première puissance économique au monde, bien plus endurante et prospère que beaucoup ne l’avaient prédit.
Pour sa part, M. Tsipras a déjà laissé entendre que les Grecs veulent avant tout être admis à la table des négociations, et davantage impliqués dans les réformes économiques de leur pays, plutôt que d’obtenir de nouveaux prêts.
C’est le chaos, et la fin de nos libertés !
En Grande-Bretagne, le conservateur David Cameron a déclaré qu’un gouvernement travailliste anti-austérité conduirait le pays au "chaos" économique. Ce mois-ci, il a même organisé une séance de photo avec cinq membres de son cabinet, alignés bien sagement, pour lancer un avertissement sur les risques de l’abandon de la politique d’austérité, comme l’écrit Mehdi Hassan du Huffington Post britannique. Ils ont brandi un dossier — qui n’avait rien d’officiel — expliquant, avec un rien d’exagération, ce qui se passerait si les électeurs laissaient les Travaillistes saper le fondement même de la nation britannique.
Ces avertissements rappellent les prévisions tout aussi alarmistes entendues par le passé. Quand François Mitterrand était le candidat de la gauche en 1981, un membre de la droite au pouvoir avait affirmé qu’une victoire des Socialistes se traduirait par l’arrivée des chars russes sur la Place de la Concorde, prélude à une période de répression sanglante.
Mitterrand a été élu. Les chars ne sont jamais arrivés. "Ca nous a longtemps fait rire", se souvient Mme Sinclair.
La même année, un ami du président Mitterrand, le socialiste Andreas Papandreou a remporté les élections en Grèce. Aussitôt, certains ont affirmé que les Occidentaux venaient de perdre la guerre froide puisque le pays – qui, décidément, a toujours un rôle clé – était passé dans le camp des Soviétiques.
La guerre froide s’est effectivement terminée quelques années plus tard… par la disparition de l’URSS.
Cet article a été écrit en collaboration avec Anne Sinclair (France), Montserrat Dominguez (Espagne), Mehdi Hasan (Grande-Bretagne), Nikos Agouros (Grèce) et Kosuke Takahashi (Japon). Publié à l’origine sur Le Huffington Post (États-Unis), il a été traduit de l’anglais par Bamiyan Shiff pour Fast for Word.
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