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vendredi 30 janvier 2015

Généralisation du service civique: une arme à double-tranchant pour François Hollande

Le Huffington Post



OUI MAIS 
Service civique, l'arme à double-tranchant


Généralisation du service civique: une arme à double-tranchant pour François Hollande

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HOLLANDE SERVICE CIVIQUE
Hollande cherche les pistes pour améliorer l'accès au service civique. | AFP

SOCIETE - Aujourd'hui ils sont 45.000. En 2017, le gouvernement espère qu'ils seront 170.000. En après, certains veulent aller jusqu'à 650.000. Que représentent ces chiffres? Le nombre de jeunes qui ont accès au service civique. Créé en 2010, il permet à des 16-25 ans de s'engager pour quelques mois dans des missions d'intérêt général.
Un dispositif que François Hollande aimerait rendre accessible à de plus en plus de jeunes. Le chef de l'Etat a réitéré ce souhait après les attentats du début janvier pour tenter d'améliorer la cohésion nationale et la transmission des valeurs de la République. Il aimerait que d'ici à la fin de son mandat, tous les jeunes volontaires y aient accès. Certains souhaitent carrément le rendre obligatoire. L'entourage du Président a même laissé fuiter, avant de démentir, l'idée selon laquelle il pourrait recourir au référendum pour imposer ce choix.
S'il venait à concrétiser l'initiative, quelle que soit la manière législative de la faire passer, il prolongerait l'unité nationale autour d'une proposition consensuelle. Il obligerait ainsi l'UMP à se ranger derrière lui et soutenir un projet que la droite a elle-même déjà proposé. Dès 2011, Jean-François Copé avait lancé l'idée, reprise par Xavier Bertrand en 2013 et souscrite à présent par NKM, Eric Ciotti ou François Baroin. L'opinion aussi partage l'engouement. Selon un sondage YouGov publié jeudi 29 janvier par 20 Minutes, 78% des Français sont ainsi favorables à une extension du service civique à tous les jeunes de 16 à 25 ans.
Citoyenneté et mixité sociale
"Si l'on estime que les attentats sont le symptôme d'un mal plus diffus dont souffre une frange de la jeunesse (...) l'universalisation du service civique offre un levier à la fois structuré et souple", estime ainsi Martin Hirsch, le père du dispositif, dans une tribune au Monde. "Le traumatisme des attentats a fait évoluer les esprits. Tout le monde reconnaît que le service civique est le chaînon manquant de la citoyenneté et qu'il faut avancer plus en avant", abonde Hugues Fourage, porte-parole des députés socialistes. Son groupe est largement impliqué dans le débat puisqu'un groupe de travail a été créé autour du député Yves Blein pour rédiger une proposition de loi pour instaurer "un service national républicain".
Un premier texte du même type avait été déposé dès 2003 par Jean-Marc Ayrault. "Un accent particulier sera apporté à la découverte et la mise en relation des jeunes dans leur diversité et leurs différences sociologiques. Il s'agira d'un moment d'immersion et d'insertion sociale pour consolider le pacte républicain. Ce service est aussi un nouveau creuset de l'intégration républicaine en favorisant le brassage social et culturel", expliquait alors le député de Loire-Atlantique.
Car s'il a été créé comme un supplétif au service militaire arrêté en 1997, le service civique -seulement facultatif- ne remplit pas totalement ses missions de mixité et de cohésion sociale, souvent attribuées (parfois à tort) à la conscription. Tel est l'un des enseignements d'un rapport de la Cour des comptes publié en février 2014. "Les résultats obtenus à ce jour ne sont pas encore satisfaisants", écrivaient les Sages, en évoquant une faible implication des jeunes n'ayant pas le bac, des jeunes issus des quartiers difficiles ou des handicapés.
Un problème de coût et de missions disponibles
Tous ces écueils pourraient être corrigés avec la proposition de loi socialiste. Ce texte viendrait modifier les conditions actuelles qui permettent chaque année à plusieurs dizaines de milliers de jeunes d'y participer. Ouvert sans condition de diplôme pour une durée de 6 à 12 mois (avec minimum 24h par semaine), il peut être effectué en France ou à l'étranger au profit d'associations, de collectivités locales ou d'établissements publics (musées, écoles...). S'il n'est pas rémunéré en tant que tel, le service civique ouvre droit à une indemnisation de 573 euros par mois.
C'est là que le bât blesse. Le service civique souffre déjà aujourd'hui d'un manque criant de moyens. "On a 170 millions d'euros de budget et il nous en faudrait 600 pour accueillir tous les jeunes volontaires", explique François Chérèque, ancien patron de la CFDT désormais à la tête de l'Agence nationale du service civique. Selon ses calculs, une généralisation à toute une génération aurait un coût de 3 milliards d'euros, ce que les députés socialistes voudraient contourner en le rendant plus court et non indemnisé.
L'autre écueil réside dans les missions à offrir à ces jeunes. Car si les besoins sont importants (soutien scolaire aux enfants en difficulté, assistance aux personnes âgées...), ils ne sont sans doute pas aussi nombreux qu'il le faudrait. C'est la cour des Comptes qui tirait la sonnette d'alarme: "Les gisements de missions nouvelles se trouvent dans des secteurs (la santé et le sport) et dans des catégories de structures (petites associations et collectivités territoriales) où les risques de substitution à l’emploi sont plus importants que dans d’autres types de secteurs et de structures. En conséquence, la Cour recommande de retenir un rythme de montée en charge du service civique compatible avec la maîtrise du risque de substitution à l’emploi induit par la multiplication des missions", prévenaient les sages de la rue Cambon, au moment où le chômage des jeunes repart à la hausse.
Chérèque prévient: "une hostilité égale au CPE"
"Je me tape le cul par terre", a carrément conclu François Chérèque quand on lui demandait sur France Inter ce qu'il pensait de la proposition des députés PS. "C'est bien de réfléchir à l'accès à la citoyenneté, le vivre-ensemble. Le service civique est un outil qui contribue à cela mais le généraliser, je ne suis pas favorable", estime-t-il. Selon lui, "la citoyenneté, c'est un engagement. Si la citoyenneté c'est obligatoire, je n'en vois pas le sens", poursuit-il. Et de conclure: si une telle proposition de loi voyait le jour, elle rencontrerait la même hostilité que le CPE en 2006.
"Le service civique fait du bien aux jeunes qui ont décidé de le faire. Il faut le rendre accessible, pas obligatoire. Une solution qui s'imposerait à tout le monde ne fonctionnera pas", avance aussi sur Europe 1 Nadia Bellaoui, présidente du Mouvement associatif. Il est vrai que plusieurs associations ont marqué leur opposition. Ainsi l'Unef est vent debout. "Obligatoire, non indemnisé, sanctionné par une amende de 15.000 euros en cas de refus, le service national républicain traduit une vision punitive de la République et un profond mépris pour les jeunes. Les jeunes veulent s’engager, pas qu’on leur fasse la morale!", lance le syndicat étudiant classé à gauche. De même, la Fage rappelle "sa ferme opposition à une telle proposition qui s’apparente plus à de la stigmatisation et à une punition collective de la jeunesse qu’à une volonté d’œuvrer au développement du sens citoyen. La démarche civique ne s’impose pas, elle s’apprend".
Pour un Président qui avait fait de la Jeunesse la priorité de ses promesses de campagne, le sujet s'annonce donc hautement sensible. François Hollande pourrait profiter de sa conférence de presse du 5 février pour préciser ses intentions.
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La suite ici --->http://www.huffingtonpost.fr/2015/01/30/generalisation-service-civique-arme-double-tranchant-francois-hollande 

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