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mercredi 28 novembre 2012

DEBAT AU SENAT : POURQUOI NOUS REFUSONS L’AUSTERITE !





DEBAT AU SENAT :
POURQUOI NOUS REFUSONS L’AUSTERITE !

LETTRE OUVERTE DES SENATEURS
DU GROUPE COMMUNISTE REPUBLICAIN ET CITOYEN (CRC)



Depuis plusieurs semaines, les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ont travaillé sur des textes fondamentaux et structurants pour l’avenir de notre pays.
Parmi ces textes, le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), la règle d’or, le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) et le projet loi de Finances (PLF) pour 2013, sont sans doute les plus emblématiques.
Nos votes sur ces textes ne relèvent pas d’une posture circonstancielle. Ce sont des votes responsables qui prennent appui sur la volonté de changement qui s’est majoritairement exprimée dans notre pays en mai et juin derniers.
Ils portent les combats du Front de gauche contre la droite et l’extrême droite, mais sont aussi exigeants pour que cette volonté de changement se concrétise par des décisions et des actes forts du gouvernement, attendus par nos concitoyens pour répondre à leurs besoins.
En n’approuvant pas ces textes, notre groupe a provoqué leur rejet par le Sénat.
Faut-il le rappeler ? Il n’y a pas de majorité de gauche au Sénat sans les 20 membres du groupe CRC.
Dès les premiers jours de la session extraordinaire de juillet, notre groupe qui souhaite la réussite de la gauche, c’est-à-dire du changement, a manifesté sa disponibilité pour travailler à la préparation de textes législatifs.
Le gouvernement n’a pas vu ou plutôt, n’a pas voulu voir le rôle charnière de notre groupe.

Nos propositions n’ont été examinées, et encore moins prises en compte, ni en amont de la présentation des projets de loi, ni durant leur examen en commission, comme en séance publique.
Les textes étaient à prendre ou à laisser. Nous n’avons pu à aucun moment, véritablement discuter, ni de l’orientation ni de leur contenu.
Nous l’affirmons avec force : nous sommes acteurs du changement. Notre seule ambition est de répondre aux attentes et exigences de notre peuple.
Le Front de gauche, nous avons soutenu au second tour de l’élection présidentielle le candidat François Hollande. Nous avons ainsi permis la défaite de la droite à laquelle nous nous sommes opposés hier comme aujourd’hui, et comme nous le ferons demain.
Fort de ses 4 millions de voix, soit 11% des votes, le Front de gauche est une composante essentielle de la majorité politique actuelle.
Avec le Front de gauche, comme le Parti communiste en son sein, ont fait le choix de ne pas participer au gouvernement qui a, d’entrée, annoncer des orientations trop éloignées d’une politique de progrès et de justice sociale.
L’absence de rupture avec les politiques libérales qui ont prévalu depuis tant d’années, a justifié l’abstention de nos camarades du groupe GDR à l’Assemblée nationale lors de la déclaration de politique générale du Premier Ministre le 3 juillet dernier, position que nous avons soutenue et fait nôtre au Sénat où ce débat se déroulait sans vote.
Notre désaccord avec un certain nombre d’orientations de la majorité gouvernementale, celle qui a voté la confiance au Premier Ministre, est connu et nos votes d’aujourd’hui ne peuvent constituer une surprise.
Avec le Front de gauche, nous avons rejeté le traité Sarkozy-Merkel qui devait être réorienté, comme le nouveau Président de la République s’y était engagé quand il était candidat, et qui fut finalement soumis à la ratification des parlementaires tel quel, sans qu’aucune virgule ne soit modifiée.
Ce recul face aux libéraux européens et les marchés est malheureusement un acte fondateur du quinquennat.
De cet acte découle les insuffisances, les contre-sens, la fausse route actuelle.
Alors que le peuple a voté pour « un changement maintenant », ce sont les dogmes libéraux qui, au-delà de quelques mesures positives, perdurent. Ils ont pour nom : compétitivité, réduction des dépenses publiques et coût du travail.
L’annonce du pacte de compétitivité, avec la hausse d’une TVA, pourtant dénoncée hier, a confirmé et renforcé nos craintes d’un refus d’affronter le monde de la finance, qualifié d’ennemi sans visage par le candidat François Hollande.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 n’a pas rompu avec la terrible logique de la maîtrise des dépenses de santé qui signifie toujours moins de soins pour une part croissante de la population et toujours plus d’inégalités face à la vieillesse.
Nous avons décidé, comme les député(e)s du groupe GDR à l’Assemblée nationale, de voter contre un texte sans ambition, ne se donnant pas les moyens de revenir sur les mesures les plus régressives des « années » Sarkozy. Nous avons maintenu ce vote quitte à provoquer le rejet par le Sénat. C’est une question de cohérence, c’est une question de respect.
Nous ne pouvons accepter - car c’est une mesure importante et symbolique - le renforcement de la taxation des retraites pour le financement de la protection sociale.
Le gouvernement connaissait notre hostilité de principe à cette mesure comme à l’absence de remise en cause des exonérations de cotisations sociales patronales.
Il n’a pas bougé d’un iota sur ces points. Plus généralement, un seul de nos 50 amendements a été accepté par la majorité gouvernementale et un seul autre a été repris par le Rapporteur général. Nous avons donc maintenu le vote contre.
Concernant le projet de loi de Finances dont le débat a commencé le 23 novembre, nous préconisons pour l’instant, tant sur les recettes que sur les dépenses, une abstention, car même si sur le plan des recettes un effort de rééquilibrage a été effectué, l’amendement « pigeons » a réduit la portée de cette avancée en retirant 750 millions de recettes sur la taxation des plus-values en matière de cession d’entreprise. Par ailleurs, nous constatons que les dépenses sont toujours marquées par le dogme libéral de réduction coûte que coûte des dépenses publiques.
Pierre Laurent, Secrétaire national du Parti communiste français, André Chassaigne, président du groupe GDR à l’Assemblée nationale, Eliane Assassi, présidente de notre groupe au Sénat, ont été reçus par le Premier Ministre.
Une liste d’amendements adoptés l’an dernier par la majorité de gauche du Sénat lui a été remise. Ces amendements ne relèvent pas de la surenchère.
Ils marquent une inflexion significative vers plus de justice sociale et fiscale.
Jusqu’à ce jour, le gouvernement maintient l’affirmation du Premier Ministre sur l’absence de marge de manœuvre et le refus de nos propositions.
De toute évidence, le carcan européen, les premières conséquences du pacte budgétaire et de sa règle d’or se font sentir.
 Le changement est-il encore à l’ordre du jour ? La question mérite d’être posée.
Notre abstention sur le budget entraînera sans doute le rejet du projet de budget par le Sénat.
Nous avons toujours dit que nous voterions les mesures qui vont dans le bon sens : ainsi, nous avons voté et voteront le projet de loi relatif au logement.
Nous avons voté en juillet le collectif budgétaire qui, alors, marquait un infléchissement net par rapport à la politique de Nicolas Sarkozy.
Nous avons pleinement participé à l’élaboration de la loi contre le harcèlement sexuel et l’avons bien entendu votée.
Nous nous engageons pleinement pour le vote dans les meilleurs délais du projet de loi instaurant le mariage pour tous.
Nous ne votons pas pour ce qui nous paraît contraire à nos engagements et aux chances de réussite de la gauche.
Outre les projets clefs de ratification du traité budgétaire européen, de l’instauration de la règle d’or, ou de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale, nous n’avons pas voté le texte relatif au statut des étrangers qui prolonge la stigmatisation d’hier.
Nous avons vivement rejeté un texte relatif à l’énergie qui engageait le démantèlement du service public, mettait en danger le principe d’égalité et aurait abouti à faire payer, à terme, plus cher l’énergie aux plus démunis.
Nous exigeons par contre dans l’urgence, l’adoption de mesures sociales dans ce domaine. Nous avons déposé une proposition de loi en ce sens qui peut être adoptée par toute la gauche dès demain.
En décembre, si rien ne bouge, nous nous opposerons au projet de loi de finances rectificative. En effet, il doit, pour l’essentiel, intégrer les dispositions du pacte de compétitivité, qui prennent à contre-pied la gauche, en allant à l’encontre des intérêts populaires.
On nous dit : « attention ! Vous vous alliez avec la droite. C’est une alliance contre nature, vous trahissez la gauche ».
C’est oublier bien vite que tant sur la ratification du traité, la loi organique portant règle d’or, le texte relatif aux étrangers (instaurant une garde à vue spécifique) que sur la reconduction des mesures sarkozistes relatives au terrorisme, seuls les renforts des voix de l’UMP et de l’UDI, ont permis au gouvernement de faire adopter ces textes par le Sénat.
Les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ne sont pas figés dans une attitude de refus systématique et stérile. Nous avons des propositions, en particulier pour la justice sociale, pour une lutte déterminée contre le chômage avec la mesure emblématique d’interdiction des licenciements boursiers pour une nouvelle répartition des richesses dans notre pays. Nous agissons avec détermination pour que ces propositions soient entendues et prises en compte.
Nous ne sommes pas dans l’opposition, fûsse-t-elle de gauche, car nous revendiquons haut et fort notre appartenance à cette majorité politique qui le 6 mai a permis de chasser la droite du pouvoir.
Mais ne pas nous entendre est sans nul doute prendre le risque de renoncer à cette majorité du changement, et décevoir cruellement les aspirations populaires.

                                                                       Paris, le 28 novembre 2012

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